- Bonjour, Mademoiselle. Je porte un enfant… S’il vous
plaît, libérez-moi !
- Ah.
- Il en va de sa survie, de la mienne et de notre bonheur, de l'Absolue Continuité de notre Irréparable Amour ! Ma place n’est pas en prison, vous le savez fort bien.
- Vous êtes dégoûtante ! Être détenue ne vous suffisait donc pas, vous voulez foutre la merde en nous refilant votre gosse !
- Mais non, bien au contraire je veux être libérée ! Je suis enceinte, par pitié Madame libérez-moi, par pitié !
- Vous êtes répugnante ! Jamais !
- Mon enfant, mon bébé !
- Oui oui votre bébé, l’État se chargera de son éducation, soyez sans crainte !
- Ma place n’est pas ici !
- Vous êtes… Mon Dieu.
- Quoi ?
- Oh, oh, oh, j’étouffe, j’étouffe ! Tant de bêtise, tant d’insolence et de répugnance ! S’il vous plaît, qu’une personne ouvre la fenêtre, je vous en supplie !
- Vous n’allez pas bien, Madame, mais vous avez un cœur, écoutez-le par pitié !
- Bien sûr que je l’écoute, puisqu’on l’enlèvera de vos sales pattes ! Ouf ! Et dire que si vous n’aviez pas été traînée en Justice, jetée en prison, vous l’auriez élevé… J’en frémis d’avance ! Pouah ! J’en vomis ! Berk ! Ouf ! Une charge pour l’État certes, mais une bonne action ! Une charmante famille bourgeoise s’en occupera, soyez sans crainte !
- Vous êtes abominable ! Plaisantez-vous, jouissez-vous de mon malheur, vous vengez-vous d’un événement passé ?
- Je n’y comprends plus rien, vous voulez le bonheur de votre enfant ou non ?
- Je le veux !
- Alors vous n’avez aucune raison de pleurer ! Elle est bien bonne ! Assumez-vous un peu, nom de Dieu !
- Mon bébé, mon bébé est dans mon ventre, il est dans la nature que je l’accouche et que je le garde, pour l’aimer, le dorloter lui chanter des chansons, lui donner tout l’amour maternel dont il a besoin !
- Il en aura ! Ainsi qu’une solide éducation dont il est, ma foi, flagrant qu’elle vous manque !
- Je sens déjà ses petits pieds… Il m’entend, il m’appelle, il voudrait vous frapper pour me protéger, briser la glace et s’enfuir avec moi dans la campagne, pour manger des fraises…
- Vous m’emmerdez. Sortez immédiatement.
- Mon bébé, mon pauvre bébé, mon enfant, ma nature, la chair de ma chair, mon frère, mon double ! Pourquoi cette cruauté ?
- Oh, merde à la fin ! On ne vous le prendra pas immédiatement, vous pourrez le câliner cinq minutes ! Allons, allons !
- Vous êtes sérieuse ?
- Mais oui ! Je vous comprends bien un peu, voyez…
- Je vous aime, Mademoiselle la serpillère, s’il vous plaît oui, OUI, OUI, OUI, OUI, OUI, OUI je vous AIME ! Je vous AIME ! Je vous AIME !
- Aaaaaaah, au secours, une folle, ramenez-la immédiatement à sa cellule jeunes gens !
J’aime cette dame ; c’est vrai, car elle est gentille de m’enlever mon enfant, car ainsi, ainsi, ainsi, son éducation sera bénéfique et désirable, installé qu’il sera dans une bonne et grande famille bourgeoise, peut-être aux côtés… hihi ! de bonnes sœurs et de bons frères – s’il vous plaît ! Ça sera bien, le bonheur parfait pour un savoir acquis dont il jouira chaque jour – au contraire de moi, la rêveuse ! La rêveuse ! La rêveuse ! Sors de ton trou, rêveuse, nous n’avons nul besoin de toi, sorcière, va-t’en, casse-toi s’il te plaît, je te conjure de nous laisser tranquilles car ta présence nous dérange ! Oui elle nous dérange ! Bien sûr ! Alors détruis-toi s’il vous plaît, le plus vite possible car nous n’attendons rien de plus bienveillant de ta part, inhumaine ! Inhumaine ! Inhumaine !
Je suis contente, je suis heureuse à la perspective de me voir dépourvue de mon enfant, car j’aurais été une mauvaise mère, car en effet je suis irresponsable, et polie, car impolie. Je ne mène pas un bon genre ! Je suis… en prison. Oui en prison. En prison. En prison. Quel malheur que tu sois dans mon ventre, chère créature, il faudrait absolument généraliser l’usage des mères porteuses !
Ah ! J’espère que ma présence ici n’aura guère de mauvaise influence sur ton cœur encore, je l’espère, gratifiant, j’espère que nul gène de la prison ne t’atteindra, cher ami !
Je suis heureuse, oui heureuse, je vais frapper ma porte pour appeler une demoiselle maton.
- Paf ! Paf ! Paf ! Mademoiselle la Maton ! Mademoiselle la Maton ! Venez ici immédiatement, car j’ai à vous parler Mademoiselle la Maton !
- Oui ?
- Bonjour, Mademoiselle la Maton, je vous suis gratifiante d’exister, car je suis un danger pour la société !
- Je vous en prie… C’est mon métier !
- Oh non, ne pleurez pas de joie je vous en supplie, car il faut des métiers dans ce bas monde afin de sacrifier l’inutilité du temps passant !
- Oh, mais ne soyez pas aveugle je… ne pleure pas – snif ! Je… ne pleure pas – snif !
- Bonjour Mademoiselle la Maton, je voudrais vous demander un service.
- Oh, je me méfie ! Oh là je me méfie ! Oui je me méfie ! Je me méfie !
- Je voudrais… revoir Mademoiselle la Directrice, pour… lui parler.
- Alors là, JAMAIS ! JAMAIS ! JAMAIS ! C’est mon travail, numéro 0638 – snif ! Mademoiselle 0638 – snif !
- C’est à cause de mon bébé, car je veux la remercier de lui éviter la sinistre éducation qu’en ma compagnie cette potentielle merveille aurait subie !
- Mais vous venez de la voir !
- Oui mais ma sortie n’était guère glorieuse, elle n’a pas compris, or moi j’aime l’absence de décalage entre les êtres, pour laquelle il est besoin d’instaurer la Rigidité Permanente en nos institutions, pour l’Interindividuelle Attention ! Oui Attention ! Oui Attention !
- Bon, puisque je suis prête à pleurer, j’accepte un mot – un seul ! Lequel choisissez-vous ?
- Euh… Euh… Euh… Euh… Euh… Euh… Merci ! Dites-lui merci !
- Oui ! Car c’est pour l’économie, car en effet c’est une supérieure, à vous comme à moi, à laquelle incombe toute l’Altérité Sécuritaire ! Vous comprenez !
- Oui ! Faites vite !
- Ah non, pas d’ordre, s’il vous plaît… Je devrais même vous retirer la moitié de votre mot, en guise de punition !
- Par pitié, non ! Excusez-moi la madame !
- C’est bon pour cette fois, mais c’est bien parce que votre reconnaissance pour la Supérieure me touche !
- Merci !
- Bien !
Oh là je suis contente, je suis heureuse, je vais peut-être la revoir, cette humaine – s’il vous plaît ! Je vais peut-être la revoir, et l’admirer de mes bons yeux, si vaillants, si forts depuis tous ses mots doux !
Je me balade dans ma cellule, en l’attente du jugement… Lalala, je me balade, lalala, je lève les bras, je souris, je ris tout en observant de ma fenêtre la cour de mes chers camarades, dont j’espère les femmes enceintes conserveront leur présence ici le plus longtemps, car la vue de leurs enfants n’est pas bonne pour eux, car ceux-ci sont des êtres fragiles, en quête d’amour d’un univers sain ! Lalala, lalala, la, la, la ! Je saute, je saute, je saute, car je suis heureuse, je suis heureuse pour mon fils, pour ma fille ! Lalala, je regarde le plafond, je le touche, et bam ! Et bam ! Et bam ! Lalala !
- Clic-clac. Bonjour. Elle ne vous veut pas.
- Mais pourquoi ?
- Pas immédiatement, du moins, car elle doit faire ses rondes… observer ses… élèves.
- Ah, oui, c’est primordial et s’il vous plaît cette option s’est retirée de ma tête, car je suis étourdie ! S’il vous plaît, communiquez-lui l’absolu de mon pardon ! Aaaah, misère ! Je vais me frapper la tête ! Je vais me frapper la tête !
- N’en faites rien, ce n’est pas si grave, elle aussi s’avère humaine, comme… vous et moi.
- Excusez-moi, je redouble en pardon car je suis une mégère !
- Ce n’est rien. Vous pourrez la voir demain matin, après son petit-déjeuner, vers 11 heures !
- Très bien ! Je suis heureuse, finalement, car l’espoir fait danser, vous savez ! J’espère qu’elle ne changera pas d’avis, j’espère qu’elle ne me le laissera pas ou ce serait une catastrophe pour son équilibre mental !
- Je l’espère également.
Je suis à nouveau seule, et je suis heureuse ! Je regarde le monde de mes barreaux, mes camarades garçons se bagarrer à l’aide d’une balle en mousse, qu’au fond de ma cage j’admire ! Haha, ils sont rigolos les garçons, dire que sans doute un nouvel être humain par eux pourrait émerger pour… le bonheur… d’une nouvelle famille, bien dans sa peau, agréable et riche au contraire de ma personne !
Ah, je suis heureuse ! Il faut que je danse, installée dans mon gros vert, car on pourrait me voir ! Il faut que je me masse les seins, pour paraître bonne vivante et… déjanter. Car la vie n’est pas perdue ! Moi, je vais guérir, ici, dans cet univers qui m’est adapté, comme pour toute la minorité de déviants qui sont dans mon cas, qu’il faut punir pour leur bien ! Le mien, le leur et le nôtre. Pour vous servir, chers maîtres, car par mes actions j’ai prouvé mon… infériorité. S’il vous plaît.
Nous sommes dix-sept heures. Il faut manger, cher Monsieur, car il se trouve en mon tiroir un paquet de gâteaux ! Que j’ai… cantiné ! Haha ! Avec les copains, tous les charmants jeunes hommes qui sont avec moi, c’est-à-dire les femmes car la mixité nous est interdite afin d’éviter… les coucheries. Les viols et les incestes, l’amour et le désir, le fabuleux bonheur de toucher l’altérité sexuelle.
Ah ! Ah ! Cela remonte à si loin, quelques mois déjà ! Le bonheur du… Ah, non alors, je ne vais pas recommencer ! Et paf, et paf, et que je me fous des baffes !
Moi, je suis heureuse, je suis une mère porteuse, afin de sauvegarder l’estime humanitaire d’une généreuse famille, celle qui prendra le fils d’une prisonnière, afin qu’il évite son influence malsaine.
Ah ! Je suis heureuse, je suis heureuse !
Ce sont des gâteaux au chocolat, pas bons, pas bons du tout pour me punir de ma présence en ce laboratoire ! Berk, il ne s’agit que de produits chimiques, afin sans doute de tester la nocivité des nouveaux ingrédients ! Berk !
Berk, mais je les mange quand même, tout en levant le bras… puis l’autre… puis l’autre… puis l’autre… Ainsi je me muscle, en effet car il existe même une salle à ce projet, pour former les… nouvelles soldates. Du bagne, afin de casser les pierres mais nouvelles et de se conformer dans le sein d’une congrégation d’ouvriers bienveillants, la main d’œuvre bon marché qu’il manquait à l’État.
Je mérite une clarification ! Bien sûr ! Je mérite une clarification car je porte un enfant que je vais lui donner, donc il doit m’être bienveillant, je dois m’apporter des cadeaux – surpriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiise ! Je dois être offerte de multiples couverts, et c’est une métaphore, afin de…
Mais non ! Mon plaisir est gratuit, c’est celui de donner, celui du double-sens humanitaire qui commence par moi.
Bref, je ne sais, toujours est-il que je suis dans mon lit, à contempler le plafond, rempli de déchirures absolument inappropriées, des défauts non-conformes qu’il faudrait m’ôter, car la prison doit aider.
Vous y avez pensé, aux évasions ? Car elle n’est pas rigide ! L’établissement n’est pas rigide, car il est rempli de trous, de déchets ainsi que de nauséabondes atmosphères, ainsi que les odeurs !
Pouah ! Mais c’est dégoûtant, sortez-moi de là tout de suite ! Berk !
Je suis ici pour purger ma peine, pour… payer ma dette à la Société.
Je me pardonne ! Je me pardonne ! Excusez-moi, je me présente mes excuses afin de vous avoir dérangée, si malheureuse Société qu’il est de mon devoir de vous apporter mon présent, mon… enfant.
Je suis heureuse de ne pas l’éduquer ! Sans moi, toute l’éducation rigide que dans une famille saine il observera !
Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah !
Ouf, ouf, je suis rassurée !
Et maintenant, c’est bientôt la tournée de nourriture, la vraie, c’est-à-dire du soir ! Oh, j’entends mes camarades garçons qui crient, car ce sont peut-être des papas !
Et mes camarades jeunes filles, ces tarées qui osent se plaindre de la qualité ! Mais vous êtes là pour payer, mesdemoiselles, certainement pas pour vous plaindre, encore heureux pour vous qu’on vous serve à manger, qu’on vous loge, et aux frais de l’État ! Ah, pauvre État qui n’a pas mérité ça, pauvre Société qui s’y cache, non mais vous ne trouvez pas ça injuste, vous ? On doit lui payer une dette, souvent énorme car on l’a blessée par nos actes, souvent non réprimés ! Et puis avec ça, malgré cette réalité nous nous dérobons, nous refusons la prison, nous clamons l’injustice de la situation, tout ça par… ego ! Par pur ego, saleté d’ego ! Un peu d’amabilité ne fait pas de mal, soyez humbles cela me fera du bien, à tous, à la Supérieure, à toute l’administration pyramidale qui nous surplombe, car par nos méfaits nous sommes au fond du gouffre, encore heureux que le mitard, pourtant plus logique, ne nous est pas appliqué automatiquement !
- Eh, salopes, de quoi vous vous plaignez ?!! Vous êtes logées et nourries aux frais du contribuable ! Fermez un peu vos gueules, ou je vous fais enregistrer pour vous faire passer à la télé !
- Elle est pas bonne la purée, goûte-la !
- Elle aura toujours un bien meilleur goût que toutes les dégoûtations dont nous nous sommes rendues coupables !
- Parle pour toi eh !
- Vous êtes insolentes. J’en parlerai à Mère Supérieure !
- On n’est pas au couvent !
- Elle est une femme, elle est bonne, elle veut nous protéger !
La dame du couloir arrive – pack ! Voilà mon plateau-repas.
Je le goûte. Il n’est pas bon, mais cette répugnance est à nul autre égard de la Bienfaisance Populatoire qui nous accueille, pour… le Bien-Être éternel, celui de nos jambes, qui ne peuvent plus marcher, car nous sommes des sous-hommes.
Voilà j’ai fini de manger, je ne suis pas repue car c’était dégueu, miam, je me régale de l’immense décalage entre son goût et le mien, qui n’est certainement pas synonyme d’eau d’égouts car je suis bien pire, je pense que j’ai le goût de sidérurgie brûlante, ou bien d’acide de toutes sortes, celui qui fait mourir.
Je fais mourir, alors je risque l’avortement, mais je ne dois pas me substituer à la Haine de Dieu.
Je vais dormir – bonne nuit mon petit, celui-là même qui (bientôt, je l’espère !) – connaîtra la Belle Famille de l’Amour Tendre !
Faiiiiiiiiis dodooooooo, Colaaaas mooon p’tiiiit frèèèèère euh faiiiiiiiis dodoooooo, t’aaaauraaas duuu lolooooo…
Hahaha, hahaha, toi tu en auras mais pas de mes seins car ils ne regorgeront que de liquide infâme, dont il est de nos survies de détruire !
Berk, mes seins semblent normaux mais ils sont atroces, je suis une créature du Diable, j’espère que je vais bientôt mourir, que la crevure que je suis bientôt crèvera, pour le bien de tous, pour… me faire pardonner. Je l’espère, car sinon ma mère eut tort de m’enfanter ! Donc j’espère mourir, afin d’éviter l’Immortalité !
Pa-pa-est-en-bas, fait-du-cho-co-lat, ma-man-est-en-haut, fait-du-bon-gâ-teauuuu…
Toi tu n’auras pas de vraie maman ni de vrai papa, mais tu en auras des faux, donc tu seras plus sain, mon garçon !
Ouuuf… Je suis heureuse, alors ainsi je puis dormir ! Me reposer pour… une journée meilleure, commençant par l’Entrevue de Mademoiselle la Directrice !
Je me lève encore trop tôt ! Chut ! Il ne faut pas faire de bruit, pour n’alerter personne pour… dire bonjour à la poussière.
- Eh, eh oh les poussières, bonjour la poussière, eh oh je vous vois un peu, grâce à la Lune, je vais jouer avec vous, si vous le voulez bien !
- …
- Je vais dessiner un bébé !
- …
- Je vais dessiner d’abord une femme enceinte. De trois quarts. Le beau front, les beaux yeux, le beau nez, la grosse bouche avec un beau sourire, les cheveux – miam ! – le corps avec le gros ventre qu’elle tient de sa main gauche, de son laaaaaaaarge sourire – en coin.
- …
- Vous n’aimez pas le coin, car elle s’avèrerait maléfique ? Je n’en sais rien, moi ! Je fais ce qu’il me plaît, dans la nature… Elle ne va point s’incarner.
- …
- Je vais prendre les mesures de mon doigt : un, deux, trois, quatre centimètres ! Heureusement que je ne suis pas grand-mère ! Peut-être un jour, qui sait !
- …
- Maintenant qu’elle est grosse, je vais lui dessiner sa naissance, autrement dit son accouchement ! Les jambes bien écartées et une, et deux, et trois ! Et la tête du bébé qui sort, mon chéri ! Mon amour de n’amour ! N’arbre ! Mon abricot, mon poussin que j’aime ainsi que par acte de preuve je vais… Mais il ne s’agit pas de moi, c’est un dessin ! Donc c’est une femme normale, enfin malgré son sourire en coin qui jamais ne constituerait une preuve nodale !
- …
- Vous ne répondez pas mais vous me comprenez, puisque je vous suis inférieure et c’est logique, eu égard à mes actions passées… Vilaines ! Vilaines ! Je mérite la mort mais la Société pense que la rédemption m’est possible, à cause d’une naïveté inhérente à la mauvaise conscience de chacun, qui veut lui faire croire qu’au fond, tout le monde est bon, mais c’est faux ! Dès qu’on commet le mal, on est mauvais, c’est pour ça que je dois mettre mon fils à l’adoption dès qu’il naîtra, après mes cinq minutes de câlin !
- …
- Vous avez raison, mes chères poussières, il faut que je persiste dans mon dessin, que je prenne acte du troisième en élaborant le bébé final !
- ...
- Miam, une grosse bouille pas contente, il est inquiet car il sent que sa mère est mauvaise, il ne sait pas le pauvre, mais il ira à l’adoption car c’est mieux, à la DDASS pour m’éviter. Voilà !
- …
- Vous avez raison, je dois me remettre en lit pour la rigidité des institutions, pas forcément dormir mais en tout cas demeurer allongée dans ce rectangle afin de leur complaire, afin que je devienne… meilleure.
Voilà, le jour arrive petit à petit, maintenant je me dois de répondre à l’impatiente attente ! Ce n’est pas si désagréable, car il me faut seulement altérer l’eau par ma saveur si douce, si douce, si douce…
Et pourtant infâme, mais petit à petit je me résorbe, en donnant mon enfant, celui que je porte.
Oui…
Bien sûr.
J’attends, le jour se lève.
C’est le matin ! Je peux me balader dans les couloirs !
Héhéhé, héhéhé ! Mademoiselle la pionne ! Mademoiselle la pionne, s’il vous plaît venez !
- Mademoiselle la maton, je suis heureuse de votre existence !
- Vous êtes brave, ma fille, raison pour laquelle on vous a offert la solitude.
- Je vous remercie, car ainsi je suis tranquille, et je peux… faire pipi et caca toute seule, ainsi que m’essuyer sans les regards inquisiteurs qui jamais ne s’évitent et qui causent tant de constipations.
- C’est un fait, vous avez raison de le signaler.
- C’est le principe du monocaméralisme.
- Voilà tout l’inconvénient, mais résidant aussi dans le principe même de punition !
- Je suis moins punie car j’ai un avantage, je suis moins dégoûtante.
- Voilà.
- C’est bien.
- Oui.
- Les onze heures sont-ils loin ?
- Dans quatre heures, après lesquelles vous pourrez la remercier.
- Oui.
- On manque de détenus comme vous dans nos prisons ! Vous seule avez en tête leur caractère humanitaire ! Vous protéger ! Nous protéger ! Vous résorber, pour finalement vous pardonner ! C’est quand même mieux que ces saletés d’amputations, d’ailleurs on n’a même plus le droit de vous frapper, ne serait-ce qu’un peu, afin de marquer notre légitime autorité!
- C’est bien dommage !
- Pour le deuxième point oui ! Pour ce qui est des amputations…
- Non, les amputations pas pour l’instant, car c’est toujours difficile de bien manier les prothèses, en général ce n’est pas le cas par la faute de la Science encore non suffisamment avancée. Nous avons besoin d’être punis certes, mais pour être pardonnés par la suite.
- Vous avez tout compris.
- Je vais me rendre à la salle de musculation – pour être soldate !
- Vous ne mangez donc pas ?
- Vous le voulez ?
- Moi ça m’est égal.
- C’est-à-dire que je suis bien bourrée, avec toute cette poussière…
- Comme vous voulez.
- C’est la nourriture principale de la prison ; elle est bonne ; je l’aime bien, moi.
Je suis dans la salle de musculation – je manie les altères ! Afin d’accorder la Bienveillance Éternelle à mon enfant, qui je l’espère ne me connaîtra pas ! Surtout pas ! Je ne veux pas qu’un jour il me reconnaisse, ni qu’il me visite à la prison, car je suis un mauvais exemple à suivre ! Il ne faut pas ! À l’adoption, cher ami, à la DDASS !
Et une, et deux, et trois – je me muscle ! Je me muscle ! Ainsi je me muscle ! Je me muscle !
Et puis je danse, parmi mes chères camarades de bureau – qui l’auraient été si elles n’avaient pas été dégénérées ! Ce n’est pas de leur faute, les pauvres… Oh non. Mais si !
Et je danse, car je suis heureuse ! Tout en pratiquant la boxe avec mon adversaire, il s’agit d’un mur ! Il s’agit d’un mur ! Il s’agit d’un mur !
Et pouf, et pouf, et pouf !
- Bonjour, cher ami le mur, vous allez bien j’espère ! Vous n’êtes pas insulté par ma présence… Car vous n’êtes point une personne.
- …
- Je suis ici pour vous témoigner ma sincère gratification à votre égard, car grâce à votre présence la Société se trouve protégée, car je suis répugnante ! Je suis répugnante ! Je suis répugnante ! Il faut l’enfermer, cette folle, à tout prix l’enfermer ! Pour le Bien de tous – pour le Bien de tous.
- …
- Vous ne répondez pas pour me punir, afin de tester ma foi mais elle est grande ! Oui grande ! Oui bien sûr ! Immense !
Et paf, et paf, et paf.
- Sluuuuuuuuuuuuurp !
C’est la demoiselle maton qui siffle.
- Sluuuuuuuuuuuuuuuuurp !
Ça veut dire que c’est fini ; ça veut dire que je dois regagner ma cellule – ouf ! Jusqu’à onze heures – ouf !
Bien ! Je suis décidée à ne RIEN faire jusqu’à ce courage – RIEN.
Je m’occupe à m’entraîner de la langue – quand même !
- Naaaaaaa… Naaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa… Naaaaaaaaaaaaaaaaaa ! Boriboribori, marmanassanassa, oralamanana, patalakassara – boribori ! Boninoussou – boribori ! Brasramngosgo ! Rmamamamama ! Moi je sais lire sur les lèvres ! Moi je sais lire sur les lèvres ! Moi je sais comprendre sans l’aide des mots, car je suis supérieure et donc… impure. Par conséquent dégénérée – s’il vous plaît ! Prenez-moi mon enfant – s’il vous plaît ! Pour le… féminisme. Par pitié. Je serais une mauvaise mère car ce rôle est terminé, de toute façon. Place à l’anonymat le plus parfait – s’il vous plaît ! Pour parfaire mon… bonheur. Je suis sale. Je suis malade mentale. Je suis absolument imperfectible ; c’est sans espoir ; toute ma vie dans cette prison vivre je vais – pour mon bien, que toutefois jamais je n’acquerrai – pour mon bien.
Maintenant je cesse de parler, maintenant j’observe le plafond – s’il vous plaît.
- On va faire la fête, ce soir !... On va faire la fête, jeunes amis, moi j’aime beaucoup, moi je vais m’éclater, avec Alexandra – s’il vous plaît, ouais. Ouais ouais ouais. La voilà la vraie vie – s’il vous plaît, dans la salle de muscu car… je rêve. Car je rêve. Oui. Je mérite ce qu’il m’arrive, car de toute façon tout est vain mais – non ! Mais non ! Mais je délire !
Aaaaaaaaaaaah ! Je frappe la porte !
- Paf ! Paf ! Paf ! S’il vous plaît ! L’hôpital ! Menez-moi à l’Hôpital Chéri, afin de m’installer des piqûres, pour le Bien du Monde car je suis en train de… soupçonner une auto-défense, aaaaaaaah ! Mais alors je ne pourrai jamais me résorber, car il ne s’agit aucunement d’abnégation, ni de reconnaissance partielle de l’altérité maléfique résidant en mon âme, pouvant par conséquent entièrement me prendre ! C’est très dangereux !
- Qu’est-ce que vous avez, encore ? C’est la prochaine heure de mademoiselle la Directrice, qui vous inquiète ?
- Je ne sais… Je pense qu’il est préférable que je la voie, pour la remercier de sa bienfaisance, tout en lui signalant la maladie mentale dont je suis atteinte, afin… de me rendre à l’hôpital au plus vite, car je suis en train de me défendre, et c’est très mal !
- Vous réglerez ça avec elle.
- D’accord.
- Ah.
- Il en va de sa survie, de la mienne et de notre bonheur, de l'Absolue Continuité de notre Irréparable Amour ! Ma place n’est pas en prison, vous le savez fort bien.
- Vous êtes dégoûtante ! Être détenue ne vous suffisait donc pas, vous voulez foutre la merde en nous refilant votre gosse !
- Mais non, bien au contraire je veux être libérée ! Je suis enceinte, par pitié Madame libérez-moi, par pitié !
- Vous êtes répugnante ! Jamais !
- Mon enfant, mon bébé !
- Oui oui votre bébé, l’État se chargera de son éducation, soyez sans crainte !
- Ma place n’est pas ici !
- Vous êtes… Mon Dieu.
- Quoi ?
- Oh, oh, oh, j’étouffe, j’étouffe ! Tant de bêtise, tant d’insolence et de répugnance ! S’il vous plaît, qu’une personne ouvre la fenêtre, je vous en supplie !
- Vous n’allez pas bien, Madame, mais vous avez un cœur, écoutez-le par pitié !
- Bien sûr que je l’écoute, puisqu’on l’enlèvera de vos sales pattes ! Ouf ! Et dire que si vous n’aviez pas été traînée en Justice, jetée en prison, vous l’auriez élevé… J’en frémis d’avance ! Pouah ! J’en vomis ! Berk ! Ouf ! Une charge pour l’État certes, mais une bonne action ! Une charmante famille bourgeoise s’en occupera, soyez sans crainte !
- Vous êtes abominable ! Plaisantez-vous, jouissez-vous de mon malheur, vous vengez-vous d’un événement passé ?
- Je n’y comprends plus rien, vous voulez le bonheur de votre enfant ou non ?
- Je le veux !
- Alors vous n’avez aucune raison de pleurer ! Elle est bien bonne ! Assumez-vous un peu, nom de Dieu !
- Mon bébé, mon bébé est dans mon ventre, il est dans la nature que je l’accouche et que je le garde, pour l’aimer, le dorloter lui chanter des chansons, lui donner tout l’amour maternel dont il a besoin !
- Il en aura ! Ainsi qu’une solide éducation dont il est, ma foi, flagrant qu’elle vous manque !
- Je sens déjà ses petits pieds… Il m’entend, il m’appelle, il voudrait vous frapper pour me protéger, briser la glace et s’enfuir avec moi dans la campagne, pour manger des fraises…
- Vous m’emmerdez. Sortez immédiatement.
- Mon bébé, mon pauvre bébé, mon enfant, ma nature, la chair de ma chair, mon frère, mon double ! Pourquoi cette cruauté ?
- Oh, merde à la fin ! On ne vous le prendra pas immédiatement, vous pourrez le câliner cinq minutes ! Allons, allons !
- Vous êtes sérieuse ?
- Mais oui ! Je vous comprends bien un peu, voyez…
- Je vous aime, Mademoiselle la serpillère, s’il vous plaît oui, OUI, OUI, OUI, OUI, OUI, OUI je vous AIME ! Je vous AIME ! Je vous AIME !
- Aaaaaaah, au secours, une folle, ramenez-la immédiatement à sa cellule jeunes gens !
J’aime cette dame ; c’est vrai, car elle est gentille de m’enlever mon enfant, car ainsi, ainsi, ainsi, son éducation sera bénéfique et désirable, installé qu’il sera dans une bonne et grande famille bourgeoise, peut-être aux côtés… hihi ! de bonnes sœurs et de bons frères – s’il vous plaît ! Ça sera bien, le bonheur parfait pour un savoir acquis dont il jouira chaque jour – au contraire de moi, la rêveuse ! La rêveuse ! La rêveuse ! Sors de ton trou, rêveuse, nous n’avons nul besoin de toi, sorcière, va-t’en, casse-toi s’il te plaît, je te conjure de nous laisser tranquilles car ta présence nous dérange ! Oui elle nous dérange ! Bien sûr ! Alors détruis-toi s’il vous plaît, le plus vite possible car nous n’attendons rien de plus bienveillant de ta part, inhumaine ! Inhumaine ! Inhumaine !
Je suis contente, je suis heureuse à la perspective de me voir dépourvue de mon enfant, car j’aurais été une mauvaise mère, car en effet je suis irresponsable, et polie, car impolie. Je ne mène pas un bon genre ! Je suis… en prison. Oui en prison. En prison. En prison. Quel malheur que tu sois dans mon ventre, chère créature, il faudrait absolument généraliser l’usage des mères porteuses !
Ah ! J’espère que ma présence ici n’aura guère de mauvaise influence sur ton cœur encore, je l’espère, gratifiant, j’espère que nul gène de la prison ne t’atteindra, cher ami !
Je suis heureuse, oui heureuse, je vais frapper ma porte pour appeler une demoiselle maton.
- Paf ! Paf ! Paf ! Mademoiselle la Maton ! Mademoiselle la Maton ! Venez ici immédiatement, car j’ai à vous parler Mademoiselle la Maton !
- Oui ?
- Bonjour, Mademoiselle la Maton, je vous suis gratifiante d’exister, car je suis un danger pour la société !
- Je vous en prie… C’est mon métier !
- Oh non, ne pleurez pas de joie je vous en supplie, car il faut des métiers dans ce bas monde afin de sacrifier l’inutilité du temps passant !
- Oh, mais ne soyez pas aveugle je… ne pleure pas – snif ! Je… ne pleure pas – snif !
- Bonjour Mademoiselle la Maton, je voudrais vous demander un service.
- Oh, je me méfie ! Oh là je me méfie ! Oui je me méfie ! Je me méfie !
- Je voudrais… revoir Mademoiselle la Directrice, pour… lui parler.
- Alors là, JAMAIS ! JAMAIS ! JAMAIS ! C’est mon travail, numéro 0638 – snif ! Mademoiselle 0638 – snif !
- C’est à cause de mon bébé, car je veux la remercier de lui éviter la sinistre éducation qu’en ma compagnie cette potentielle merveille aurait subie !
- Mais vous venez de la voir !
- Oui mais ma sortie n’était guère glorieuse, elle n’a pas compris, or moi j’aime l’absence de décalage entre les êtres, pour laquelle il est besoin d’instaurer la Rigidité Permanente en nos institutions, pour l’Interindividuelle Attention ! Oui Attention ! Oui Attention !
- Bon, puisque je suis prête à pleurer, j’accepte un mot – un seul ! Lequel choisissez-vous ?
- Euh… Euh… Euh… Euh… Euh… Euh… Merci ! Dites-lui merci !
- Oui ! Car c’est pour l’économie, car en effet c’est une supérieure, à vous comme à moi, à laquelle incombe toute l’Altérité Sécuritaire ! Vous comprenez !
- Oui ! Faites vite !
- Ah non, pas d’ordre, s’il vous plaît… Je devrais même vous retirer la moitié de votre mot, en guise de punition !
- Par pitié, non ! Excusez-moi la madame !
- C’est bon pour cette fois, mais c’est bien parce que votre reconnaissance pour la Supérieure me touche !
- Merci !
- Bien !
Oh là je suis contente, je suis heureuse, je vais peut-être la revoir, cette humaine – s’il vous plaît ! Je vais peut-être la revoir, et l’admirer de mes bons yeux, si vaillants, si forts depuis tous ses mots doux !
Je me balade dans ma cellule, en l’attente du jugement… Lalala, je me balade, lalala, je lève les bras, je souris, je ris tout en observant de ma fenêtre la cour de mes chers camarades, dont j’espère les femmes enceintes conserveront leur présence ici le plus longtemps, car la vue de leurs enfants n’est pas bonne pour eux, car ceux-ci sont des êtres fragiles, en quête d’amour d’un univers sain ! Lalala, lalala, la, la, la ! Je saute, je saute, je saute, car je suis heureuse, je suis heureuse pour mon fils, pour ma fille ! Lalala, je regarde le plafond, je le touche, et bam ! Et bam ! Et bam ! Lalala !
- Clic-clac. Bonjour. Elle ne vous veut pas.
- Mais pourquoi ?
- Pas immédiatement, du moins, car elle doit faire ses rondes… observer ses… élèves.
- Ah, oui, c’est primordial et s’il vous plaît cette option s’est retirée de ma tête, car je suis étourdie ! S’il vous plaît, communiquez-lui l’absolu de mon pardon ! Aaaah, misère ! Je vais me frapper la tête ! Je vais me frapper la tête !
- N’en faites rien, ce n’est pas si grave, elle aussi s’avère humaine, comme… vous et moi.
- Excusez-moi, je redouble en pardon car je suis une mégère !
- Ce n’est rien. Vous pourrez la voir demain matin, après son petit-déjeuner, vers 11 heures !
- Très bien ! Je suis heureuse, finalement, car l’espoir fait danser, vous savez ! J’espère qu’elle ne changera pas d’avis, j’espère qu’elle ne me le laissera pas ou ce serait une catastrophe pour son équilibre mental !
- Je l’espère également.
Je suis à nouveau seule, et je suis heureuse ! Je regarde le monde de mes barreaux, mes camarades garçons se bagarrer à l’aide d’une balle en mousse, qu’au fond de ma cage j’admire ! Haha, ils sont rigolos les garçons, dire que sans doute un nouvel être humain par eux pourrait émerger pour… le bonheur… d’une nouvelle famille, bien dans sa peau, agréable et riche au contraire de ma personne !
Ah, je suis heureuse ! Il faut que je danse, installée dans mon gros vert, car on pourrait me voir ! Il faut que je me masse les seins, pour paraître bonne vivante et… déjanter. Car la vie n’est pas perdue ! Moi, je vais guérir, ici, dans cet univers qui m’est adapté, comme pour toute la minorité de déviants qui sont dans mon cas, qu’il faut punir pour leur bien ! Le mien, le leur et le nôtre. Pour vous servir, chers maîtres, car par mes actions j’ai prouvé mon… infériorité. S’il vous plaît.
Nous sommes dix-sept heures. Il faut manger, cher Monsieur, car il se trouve en mon tiroir un paquet de gâteaux ! Que j’ai… cantiné ! Haha ! Avec les copains, tous les charmants jeunes hommes qui sont avec moi, c’est-à-dire les femmes car la mixité nous est interdite afin d’éviter… les coucheries. Les viols et les incestes, l’amour et le désir, le fabuleux bonheur de toucher l’altérité sexuelle.
Ah ! Ah ! Cela remonte à si loin, quelques mois déjà ! Le bonheur du… Ah, non alors, je ne vais pas recommencer ! Et paf, et paf, et que je me fous des baffes !
Moi, je suis heureuse, je suis une mère porteuse, afin de sauvegarder l’estime humanitaire d’une généreuse famille, celle qui prendra le fils d’une prisonnière, afin qu’il évite son influence malsaine.
Ah ! Je suis heureuse, je suis heureuse !
Ce sont des gâteaux au chocolat, pas bons, pas bons du tout pour me punir de ma présence en ce laboratoire ! Berk, il ne s’agit que de produits chimiques, afin sans doute de tester la nocivité des nouveaux ingrédients ! Berk !
Berk, mais je les mange quand même, tout en levant le bras… puis l’autre… puis l’autre… puis l’autre… Ainsi je me muscle, en effet car il existe même une salle à ce projet, pour former les… nouvelles soldates. Du bagne, afin de casser les pierres mais nouvelles et de se conformer dans le sein d’une congrégation d’ouvriers bienveillants, la main d’œuvre bon marché qu’il manquait à l’État.
Je mérite une clarification ! Bien sûr ! Je mérite une clarification car je porte un enfant que je vais lui donner, donc il doit m’être bienveillant, je dois m’apporter des cadeaux – surpriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiise ! Je dois être offerte de multiples couverts, et c’est une métaphore, afin de…
Mais non ! Mon plaisir est gratuit, c’est celui de donner, celui du double-sens humanitaire qui commence par moi.
Bref, je ne sais, toujours est-il que je suis dans mon lit, à contempler le plafond, rempli de déchirures absolument inappropriées, des défauts non-conformes qu’il faudrait m’ôter, car la prison doit aider.
Vous y avez pensé, aux évasions ? Car elle n’est pas rigide ! L’établissement n’est pas rigide, car il est rempli de trous, de déchets ainsi que de nauséabondes atmosphères, ainsi que les odeurs !
Pouah ! Mais c’est dégoûtant, sortez-moi de là tout de suite ! Berk !
Je suis ici pour purger ma peine, pour… payer ma dette à la Société.
Je me pardonne ! Je me pardonne ! Excusez-moi, je me présente mes excuses afin de vous avoir dérangée, si malheureuse Société qu’il est de mon devoir de vous apporter mon présent, mon… enfant.
Je suis heureuse de ne pas l’éduquer ! Sans moi, toute l’éducation rigide que dans une famille saine il observera !
Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah !
Ouf, ouf, je suis rassurée !
Et maintenant, c’est bientôt la tournée de nourriture, la vraie, c’est-à-dire du soir ! Oh, j’entends mes camarades garçons qui crient, car ce sont peut-être des papas !
Et mes camarades jeunes filles, ces tarées qui osent se plaindre de la qualité ! Mais vous êtes là pour payer, mesdemoiselles, certainement pas pour vous plaindre, encore heureux pour vous qu’on vous serve à manger, qu’on vous loge, et aux frais de l’État ! Ah, pauvre État qui n’a pas mérité ça, pauvre Société qui s’y cache, non mais vous ne trouvez pas ça injuste, vous ? On doit lui payer une dette, souvent énorme car on l’a blessée par nos actes, souvent non réprimés ! Et puis avec ça, malgré cette réalité nous nous dérobons, nous refusons la prison, nous clamons l’injustice de la situation, tout ça par… ego ! Par pur ego, saleté d’ego ! Un peu d’amabilité ne fait pas de mal, soyez humbles cela me fera du bien, à tous, à la Supérieure, à toute l’administration pyramidale qui nous surplombe, car par nos méfaits nous sommes au fond du gouffre, encore heureux que le mitard, pourtant plus logique, ne nous est pas appliqué automatiquement !
- Eh, salopes, de quoi vous vous plaignez ?!! Vous êtes logées et nourries aux frais du contribuable ! Fermez un peu vos gueules, ou je vous fais enregistrer pour vous faire passer à la télé !
- Elle est pas bonne la purée, goûte-la !
- Elle aura toujours un bien meilleur goût que toutes les dégoûtations dont nous nous sommes rendues coupables !
- Parle pour toi eh !
- Vous êtes insolentes. J’en parlerai à Mère Supérieure !
- On n’est pas au couvent !
- Elle est une femme, elle est bonne, elle veut nous protéger !
La dame du couloir arrive – pack ! Voilà mon plateau-repas.
Je le goûte. Il n’est pas bon, mais cette répugnance est à nul autre égard de la Bienfaisance Populatoire qui nous accueille, pour… le Bien-Être éternel, celui de nos jambes, qui ne peuvent plus marcher, car nous sommes des sous-hommes.
Voilà j’ai fini de manger, je ne suis pas repue car c’était dégueu, miam, je me régale de l’immense décalage entre son goût et le mien, qui n’est certainement pas synonyme d’eau d’égouts car je suis bien pire, je pense que j’ai le goût de sidérurgie brûlante, ou bien d’acide de toutes sortes, celui qui fait mourir.
Je fais mourir, alors je risque l’avortement, mais je ne dois pas me substituer à la Haine de Dieu.
Je vais dormir – bonne nuit mon petit, celui-là même qui (bientôt, je l’espère !) – connaîtra la Belle Famille de l’Amour Tendre !
Faiiiiiiiiis dodooooooo, Colaaaas mooon p’tiiiit frèèèèère euh faiiiiiiiis dodoooooo, t’aaaauraaas duuu lolooooo…
Hahaha, hahaha, toi tu en auras mais pas de mes seins car ils ne regorgeront que de liquide infâme, dont il est de nos survies de détruire !
Berk, mes seins semblent normaux mais ils sont atroces, je suis une créature du Diable, j’espère que je vais bientôt mourir, que la crevure que je suis bientôt crèvera, pour le bien de tous, pour… me faire pardonner. Je l’espère, car sinon ma mère eut tort de m’enfanter ! Donc j’espère mourir, afin d’éviter l’Immortalité !
Pa-pa-est-en-bas, fait-du-cho-co-lat, ma-man-est-en-haut, fait-du-bon-gâ-teauuuu…
Toi tu n’auras pas de vraie maman ni de vrai papa, mais tu en auras des faux, donc tu seras plus sain, mon garçon !
Ouuuf… Je suis heureuse, alors ainsi je puis dormir ! Me reposer pour… une journée meilleure, commençant par l’Entrevue de Mademoiselle la Directrice !
Je me lève encore trop tôt ! Chut ! Il ne faut pas faire de bruit, pour n’alerter personne pour… dire bonjour à la poussière.
- Eh, eh oh les poussières, bonjour la poussière, eh oh je vous vois un peu, grâce à la Lune, je vais jouer avec vous, si vous le voulez bien !
- …
- Je vais dessiner un bébé !
- …
- Je vais dessiner d’abord une femme enceinte. De trois quarts. Le beau front, les beaux yeux, le beau nez, la grosse bouche avec un beau sourire, les cheveux – miam ! – le corps avec le gros ventre qu’elle tient de sa main gauche, de son laaaaaaaarge sourire – en coin.
- …
- Vous n’aimez pas le coin, car elle s’avèrerait maléfique ? Je n’en sais rien, moi ! Je fais ce qu’il me plaît, dans la nature… Elle ne va point s’incarner.
- …
- Je vais prendre les mesures de mon doigt : un, deux, trois, quatre centimètres ! Heureusement que je ne suis pas grand-mère ! Peut-être un jour, qui sait !
- …
- Maintenant qu’elle est grosse, je vais lui dessiner sa naissance, autrement dit son accouchement ! Les jambes bien écartées et une, et deux, et trois ! Et la tête du bébé qui sort, mon chéri ! Mon amour de n’amour ! N’arbre ! Mon abricot, mon poussin que j’aime ainsi que par acte de preuve je vais… Mais il ne s’agit pas de moi, c’est un dessin ! Donc c’est une femme normale, enfin malgré son sourire en coin qui jamais ne constituerait une preuve nodale !
- …
- Vous ne répondez pas mais vous me comprenez, puisque je vous suis inférieure et c’est logique, eu égard à mes actions passées… Vilaines ! Vilaines ! Je mérite la mort mais la Société pense que la rédemption m’est possible, à cause d’une naïveté inhérente à la mauvaise conscience de chacun, qui veut lui faire croire qu’au fond, tout le monde est bon, mais c’est faux ! Dès qu’on commet le mal, on est mauvais, c’est pour ça que je dois mettre mon fils à l’adoption dès qu’il naîtra, après mes cinq minutes de câlin !
- …
- Vous avez raison, mes chères poussières, il faut que je persiste dans mon dessin, que je prenne acte du troisième en élaborant le bébé final !
- ...
- Miam, une grosse bouille pas contente, il est inquiet car il sent que sa mère est mauvaise, il ne sait pas le pauvre, mais il ira à l’adoption car c’est mieux, à la DDASS pour m’éviter. Voilà !
- …
- Vous avez raison, je dois me remettre en lit pour la rigidité des institutions, pas forcément dormir mais en tout cas demeurer allongée dans ce rectangle afin de leur complaire, afin que je devienne… meilleure.
Voilà, le jour arrive petit à petit, maintenant je me dois de répondre à l’impatiente attente ! Ce n’est pas si désagréable, car il me faut seulement altérer l’eau par ma saveur si douce, si douce, si douce…
Et pourtant infâme, mais petit à petit je me résorbe, en donnant mon enfant, celui que je porte.
Oui…
Bien sûr.
J’attends, le jour se lève.
C’est le matin ! Je peux me balader dans les couloirs !
Héhéhé, héhéhé ! Mademoiselle la pionne ! Mademoiselle la pionne, s’il vous plaît venez !
- Mademoiselle la maton, je suis heureuse de votre existence !
- Vous êtes brave, ma fille, raison pour laquelle on vous a offert la solitude.
- Je vous remercie, car ainsi je suis tranquille, et je peux… faire pipi et caca toute seule, ainsi que m’essuyer sans les regards inquisiteurs qui jamais ne s’évitent et qui causent tant de constipations.
- C’est un fait, vous avez raison de le signaler.
- C’est le principe du monocaméralisme.
- Voilà tout l’inconvénient, mais résidant aussi dans le principe même de punition !
- Je suis moins punie car j’ai un avantage, je suis moins dégoûtante.
- Voilà.
- C’est bien.
- Oui.
- Les onze heures sont-ils loin ?
- Dans quatre heures, après lesquelles vous pourrez la remercier.
- Oui.
- On manque de détenus comme vous dans nos prisons ! Vous seule avez en tête leur caractère humanitaire ! Vous protéger ! Nous protéger ! Vous résorber, pour finalement vous pardonner ! C’est quand même mieux que ces saletés d’amputations, d’ailleurs on n’a même plus le droit de vous frapper, ne serait-ce qu’un peu, afin de marquer notre légitime autorité!
- C’est bien dommage !
- Pour le deuxième point oui ! Pour ce qui est des amputations…
- Non, les amputations pas pour l’instant, car c’est toujours difficile de bien manier les prothèses, en général ce n’est pas le cas par la faute de la Science encore non suffisamment avancée. Nous avons besoin d’être punis certes, mais pour être pardonnés par la suite.
- Vous avez tout compris.
- Je vais me rendre à la salle de musculation – pour être soldate !
- Vous ne mangez donc pas ?
- Vous le voulez ?
- Moi ça m’est égal.
- C’est-à-dire que je suis bien bourrée, avec toute cette poussière…
- Comme vous voulez.
- C’est la nourriture principale de la prison ; elle est bonne ; je l’aime bien, moi.
Je suis dans la salle de musculation – je manie les altères ! Afin d’accorder la Bienveillance Éternelle à mon enfant, qui je l’espère ne me connaîtra pas ! Surtout pas ! Je ne veux pas qu’un jour il me reconnaisse, ni qu’il me visite à la prison, car je suis un mauvais exemple à suivre ! Il ne faut pas ! À l’adoption, cher ami, à la DDASS !
Et une, et deux, et trois – je me muscle ! Je me muscle ! Ainsi je me muscle ! Je me muscle !
Et puis je danse, parmi mes chères camarades de bureau – qui l’auraient été si elles n’avaient pas été dégénérées ! Ce n’est pas de leur faute, les pauvres… Oh non. Mais si !
Et je danse, car je suis heureuse ! Tout en pratiquant la boxe avec mon adversaire, il s’agit d’un mur ! Il s’agit d’un mur ! Il s’agit d’un mur !
Et pouf, et pouf, et pouf !
- Bonjour, cher ami le mur, vous allez bien j’espère ! Vous n’êtes pas insulté par ma présence… Car vous n’êtes point une personne.
- …
- Je suis ici pour vous témoigner ma sincère gratification à votre égard, car grâce à votre présence la Société se trouve protégée, car je suis répugnante ! Je suis répugnante ! Je suis répugnante ! Il faut l’enfermer, cette folle, à tout prix l’enfermer ! Pour le Bien de tous – pour le Bien de tous.
- …
- Vous ne répondez pas pour me punir, afin de tester ma foi mais elle est grande ! Oui grande ! Oui bien sûr ! Immense !
Et paf, et paf, et paf.
- Sluuuuuuuuuuuuurp !
C’est la demoiselle maton qui siffle.
- Sluuuuuuuuuuuuuuuuurp !
Ça veut dire que c’est fini ; ça veut dire que je dois regagner ma cellule – ouf ! Jusqu’à onze heures – ouf !
Bien ! Je suis décidée à ne RIEN faire jusqu’à ce courage – RIEN.
Je m’occupe à m’entraîner de la langue – quand même !
- Naaaaaaa… Naaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa… Naaaaaaaaaaaaaaaaaa ! Boriboribori, marmanassanassa, oralamanana, patalakassara – boribori ! Boninoussou – boribori ! Brasramngosgo ! Rmamamamama ! Moi je sais lire sur les lèvres ! Moi je sais lire sur les lèvres ! Moi je sais comprendre sans l’aide des mots, car je suis supérieure et donc… impure. Par conséquent dégénérée – s’il vous plaît ! Prenez-moi mon enfant – s’il vous plaît ! Pour le… féminisme. Par pitié. Je serais une mauvaise mère car ce rôle est terminé, de toute façon. Place à l’anonymat le plus parfait – s’il vous plaît ! Pour parfaire mon… bonheur. Je suis sale. Je suis malade mentale. Je suis absolument imperfectible ; c’est sans espoir ; toute ma vie dans cette prison vivre je vais – pour mon bien, que toutefois jamais je n’acquerrai – pour mon bien.
Maintenant je cesse de parler, maintenant j’observe le plafond – s’il vous plaît.
- On va faire la fête, ce soir !... On va faire la fête, jeunes amis, moi j’aime beaucoup, moi je vais m’éclater, avec Alexandra – s’il vous plaît, ouais. Ouais ouais ouais. La voilà la vraie vie – s’il vous plaît, dans la salle de muscu car… je rêve. Car je rêve. Oui. Je mérite ce qu’il m’arrive, car de toute façon tout est vain mais – non ! Mais non ! Mais je délire !
Aaaaaaaaaaaah ! Je frappe la porte !
- Paf ! Paf ! Paf ! S’il vous plaît ! L’hôpital ! Menez-moi à l’Hôpital Chéri, afin de m’installer des piqûres, pour le Bien du Monde car je suis en train de… soupçonner une auto-défense, aaaaaaaah ! Mais alors je ne pourrai jamais me résorber, car il ne s’agit aucunement d’abnégation, ni de reconnaissance partielle de l’altérité maléfique résidant en mon âme, pouvant par conséquent entièrement me prendre ! C’est très dangereux !
- Qu’est-ce que vous avez, encore ? C’est la prochaine heure de mademoiselle la Directrice, qui vous inquiète ?
- Je ne sais… Je pense qu’il est préférable que je la voie, pour la remercier de sa bienfaisance, tout en lui signalant la maladie mentale dont je suis atteinte, afin… de me rendre à l’hôpital au plus vite, car je suis en train de me défendre, et c’est très mal !
- Vous réglerez ça avec elle.
- D’accord.
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